La Cour Suprême américaine confirme le droit individuel de posséder une arme à feu

27 06 2008

La Chine vient d’être tancée par les États-Unis pour ses ventes d’armes conventionnelles et pour « les affaires » qu’elle transige avec certains pays qui déplaisant à l’Oncle Sam, comme l’Iran, notamment. Pendant que le pays perse est sous le coup de trois résolutions du Conseil de sécurité assorties de sanctions pour son refus d’abandonner son programme nucléaire, la Chine contourne les règles et fournit des armes à l’Iran, axe du mal, qui à son tour , fournit des armes aux insurgés d’Irak, du Liban et de l’Afghanistan qui, à leur tour, tuent des Américains.

Nous nous retrouvons en plein cercle infernal. La Chine violerait ainsi, selon le secrétaire adjoint à la Défense pour les affaires de sécurité en Asie et dans le Pacifique, les règles de non-prolifération. Mais il y aurait pire, selon les Américains. Des entreprises chinoises ou des individus isolés « transfèrent toujours une grande variété de matériel et de technologies liés à l’armement dans le monde », incluant des pays comme la Birmanie, le Zimbabwe, Cuba, le Soudan et la Syrie.

Pendant ce temps-là, en Irak, les soldats américains viennent de recevoir de nouvelles consignes pour améliorer leur stratégie sur le terrain. Dans un document en 23 points, le général David Petraeus insiste notamment sur la nécessité d’« utiliser l’argent comme arme » et, sur le terrain, de séparer les « conciliants » et les « non conciliants », une formule pour désigner les Irakiens travaillant à l’unité du pays des insurgés sunnites, miliciens chiites et de leurs affiliés. « Nous devons nous efforcer de faire participer les conciliants à la solution et dans le même temps identifier, poursuivre, tuer, capturer et écarter les non conciliants », dit le général. La baisse relative de la violence a conduit les soldats américains à sortir plus souvent de leurs bases pour patrouiller dans les rues.

S’il est interdit d’armer les populations civiles d’Irak, qualifiées d’insurgées, dans certains cas, il en va tout autrement aux États-Unis même. Pour la première fois depuis 1939, la Cour suprême américaine, par 5 voix contre 4, confirme le droit de chaque citoyen de posséder une arme. Ce droit étant garanti par la Constitution, il ne saurait donc être question d’en limiter l’usage au nom de la sécurité publique.

L’amendement de 1791 stipule qu’une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d’un Etat libre, le droit du peuple à détenir et porter des armes ne doit pas être transgressé. Selon le juge Antonin Scalia, la Constitution américaine n’autorise pas la « prohibition absolue des armes détenues et utilisées pour l’autodéfense au domicile ». En conséquence, « le deuxième amendement protège un droit individuel de posséder une arme à feu sans rapport avec le service militaire, et le droit d’en faire usage dans un but légal, comme l’autodéfense chez soi », écrit le juge Antonin Scalia. Pour rassurant qu’il soit, la Cour suprême précise que l’arrêt de 157 pages ne remet pas en cause les lois adoptées de longue date interdisant la possession d’armes par des criminels ou des personnes souffrant de maladies mentales. Et voilà qui devrait rassurer la population bien armée : les armes, par ailleurs, restent prohibées « dans des endroits sensibles comme les écoles ou les bâtiments gouvernementaux », a ajouté le magistrat. Chicago et New York vont devoir réévaluer leur législation sur la question de la prohibition des armes sur leur territoire.

Le district de Columbia avait bien, depuis 1976, tenté de limiter la possession d’armes à feu en empêchant leur enregistrement : les fusils de chasse devaient être démontés à domicile autant que lors de leurs transports. Les armes de poing, achetées avant 1976, devaient être neutralisées par un verrou de sûreté.

Les candidats à la présidentielle américaine ont commenté favorablement, il va sans dire, cette décision qui renforce, comme l’indique Barack Obama, « l’idée que si nous agissons de manière responsable, nous pouvons à la fois protéger le droit constitutionnel à porter des armes et protéger nos quartiers et nos enfants avec des lois de bon sens ». Je ne pouvais m’empêcher de souligner ces trois derniers mots.

John McCain se montre plus exubérant : il applaudit « une victoire historique ». Avec une pointe lancée à son adversaire politique, le candidat républicain considère que, contrairement aux élitistes qui pensent que les Américains se raccrochent aux armes par amertume, « la décision d’aujourd’hui reconnaît que posséder une arme est un droit fondamental, sacré ».

Ce que devraient préciser, autant Obama que McCain, est le fait que ce jugement donne aux millions de membres de la puissante NRA, le puissant lobby des armes, une victoire absolue. Comme pour se dédouaner, le juge Scalia, au nom de la majorité, précise : « Sans aucun doute, certains pensent que le deuxième amendement est démodé (… mais) il est indiscutable qu’il ne revient pas à cette Cour de prononcer (son) décès ».

Alors que les attentats du 11 septembre 2001 ont fait près de 3 000 morts, 16 137 personnes ont été victimes de meurtre en 2004.

Il existerait, au total, aux États-Unis, plus de 40 000 lois fédérales contrôlant le port d’armes dont onze lois fédérales majeures ont été mises en fonction depuis 1927. Plus de 200 millions d’armes à feu circulent aux Etats-Unis. Comme le montre Éthique Info, « les armes à feu ont été utilisées avec une grande fréquence ces derniers temps aux Etats-Unis puisque, en 2005, ce chiffre s’est élevé à 17.000 suicides, 12.000 homicides et près de 800 accidents dus à ces instruments. Au moins la moitié de ces morts sont survenues sur une population composée essentiellement de jeunes gens au-dessous de 35 ans. Si l’on tient compte des blessures sans décès on arrive à un total de 70.000 dommages non mortels dus à des armes à feu parmi des femmes, des enfants tués ou seulement blessés en l’espace d’un an. Cette somme se traduit en une mort toutes les 17 minutes et un décès ou un accident non mortel toutes les 5 minutes. Ce résultat constitue un véritable problème de santé publique qui exige une réaction de la part des pouvoirs publics ».

En effet, selon le Brady Center, les armes coûtent 100 milliards de dollars à la société américaine chaque année en revenus perdus par les morts, les frais médicaux pour soigner les blessés, et les frais de justice et de détention pour punir les criminels. Il faut savoir que le « Gun Control Act » de 1968 interdit la vente de poing aux moins de 21 ans et celle de carabines ou de fusils de chasse aux moins de 18 ans. Seize États américains ont également adopté une loi rendant les adultes légalement responsables si des enfants ont accès à leurs armes et s’en servent.

Sur le contrôle des armes à feu, Éthique Info rappelle que « plusieurs études de grande envergure montrent que les mesures de contrôle sont inefficaces en matière de prévention. Gary Kleck, criminologue enseignant à l’Université Florida State, a déterminé que les armes à feu sont utilisées à titre défensif dans plus de 2 millions de cas par an aux États-Unis. Les statistiques officielles portent à croire qu’elles serviraient en revanche à perpétrer près d’un million de crimes ».

Le « Gun Control Act » interdit aux personnes jugées ou en cours de jugement encourant à une peine de plus d’un an, aux fugitifs, aux dealers de drogue et aux immigrés illégaux d’acheter ou de porter une arme à feu. La possession d’une arme illégalement convertie en arme automatique ou d’une pièce détachée destinée à la conversion est une offense fédérale punissable par 10 ans de prison et une amende de 10,000 dollars.

Comme l’indique le site France-Jeunes, depuis 1994, sous l’administration Clinton, il existe une loi – la loi Brady – exigeant que l’identité des acheteurs d’armes soit contrôlée. Dans un souci de compromis avec la puissante National Riffle Association, le gouvernement a promis que les données recueillies à l’aide du National Instant Criminal Background Check System ne seraient en aucun cas utilisées pour constituer un registre des armes à feu et de leurs propriétaires. Au départ, ces données étaient conservées pendant 180 jours pour être ensuite détruites. Sous les pressions de la NRA, ce délai a été raccourci récemment à 90 jours.

Sur le site du gouvernement américain, UsInfo, madame Rachel Stohl, analyste au Center for Defense Information (Centre d’information sur la défense) et présidente du Groupe de travail américain sur les armes légères, écrivait en 2001 : « Il importe plus que jamais que les États-Unis assument un rôle de premier plan dans la question des armes légères qui, dans le passé, n’a pas reçu de priorité élevée dans les milieux politiques américains. […]Les armes légères font peser une menace réelle sur la sécurité nationale des États-Unis du fait que leur prolifération perpétue les conflits et crée de nouveaux cycles de violence et d’activités criminelles. Qui plus est, la prolifération effrénée des armes légères met en danger les soldats américains qui participent aux opérations de maintien de la paix quand l’excès de ces armes déstabilise les zones de combat ou quand les arsenaux clandestins ne sont pas éliminés après un conflit. Les armes légères réduisent aussi les débouchés commerciaux des États-Unis, empêchent les organisations humanitaires et de secours de s’acquitter de leur tâche et diminuent les possibilités de développement durable ».

(Sources : AFP, Cyberpresse, Le Monde, Presse canadienne, US-Info)

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5 responses

27 06 2008
Françoise

Pierre,

J’avais vu cette nouvelle hier soir. Les petits progrès qui avaient été faits, difficilement, sont ainsi réduits à néant. Que les candidats à la présidence se réjouissent, haut et fort, de ce jugement est atterrant.

Rien ne change au beau pays du « Far West »…

27 06 2008
Pierre Chantelois

Françoise

Le Québec et les États-Unis se côtoient. Nous sommes limitrophes. Nos voisins viennent nous visiter en laissant leurs armes à la maison. Sont-ils plus exposés aux dangers en venant au Québec? Pas du tout.

Si vous avez le temps et que la curiosité est plus forte que toute chose tâche domestique, aujourd’hui, je vous recommande de parcourir le site : USA Élection 2008 (en français), notamment cette page : Le second amendement Américain ou le droit de port d’arme. Édifiant. En voici un avant-goût : « Avoir des citoyens armés est donc une garantie de la liberté des individus et de leur capacité de protection face au totalitarisme. En Russie, Lénine et Trotsky ont supprimé le droit de port d’arme. Politique suivie par Staline par la suite. En Allemagne, c’était Hitler. En Italie, Mussolini. En France, Pierre Laval. En Chine, Mao. La liste est aussi longue que celle des dictatures du XX° siècle ».

Pierre R.

27 06 2008
Françoise

Pierre,

Merci pour ce complément d’information édifiant. Lorsque l’on veut défendre l’indéfendable, tous le argument sont bons, même les plus spécieux.

27 06 2008
Catherine

Ah oui, les armes à feu – sujet delicat. Le pour et le contre – tout dépend de quelles mains il s’agisse. Certains membres de notre famille en possèdent, mais j’avoue qu’il serait désastreux pour certains dans mon voisinage…

28 06 2008
clusiau

Moi je n’ai pas d’arme mais je ne voudrais pas empêcher ceux qui en veulent d’en avoir.

Un adulte devrait avoir le droit de posséder ce qu’il veut.
L’automobile tue pas mal plus que les armes, nous viendrait-il à l’idée d’en restreindre l’achat ?

Moi cette idée que des gouvernements « démocratiques » se mêlent de nous paterner ou nous materner, ça m’écœure ben raide.

Quel mal y a-t-il à posséder une arme enfin ? Bon samedi.

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