Que connaissez-vous du pétrole ? Pour ma part, rien. Si ce n’est ce yoyo incessant dans le prix du baril. Imaginez. Les prophètes de malheur prédisaient qu’il atteindrait les 200 $ avant la fin de 2008. De 147,3 USD qu’il était le 11 juillet, le baril est passé à environ 115 USD ces jours derniers.
Je n’ai pas de voiture. Pas de permis de conduire. Une rareté. Je suis une rareté. Jamais n’ai-je déposé les mains sur un volant. Je n’aime pas l’automobile. Cela remonte à mon enfance. Voyager en automobile signifiait, chaque fois, être malade. J’avais en horreur l’automobile. Sa senteur. Sa lenteur (mon père, âgé, conduisait trop prudemment et il conduisait à contresens, à ma plus grande stupéfaction). Tout était réuni pour que je déteste viscéralement ce transport motorisé.
Le pétrole. Mal du siècle incontournable. L’or noir accuse une baisse de 21%. Le brut devrait osciller entre 80 et 100 USD le baril à la fin de l’année. Baisse qui n’est pas sans conséquences. L’once d’or est passée de 1.000 à 800 dollars. Mais pourquoi cette baisse ? À cause des automobilistes. Une baisse de la consommation en Europe, en France en particulier, mais aussi aux États-Unis serait responsable de cet effondrement. Il paraît que, selon la formule entendue, les automobilistes américains ont conduit plus prudemment et plus lentement. Pire. Ils ont conduit trois fois moins qu’à leur habitude.
Au garage les bolides, les Hummers de ce monde.
Tout cela est bien beau. Mais est-ce que les consommateurs ont profité de cette chute ? Je ne crois pas. Il m’est difficile de le confirmer, je ne fais pas de plein d’essence.
L’euphorie passée, les économistes, ces vieilles corneilles annonciatrices de malheur, nous préviennent. L’explosion économique de l’Inde et de la Chine pourraient relancer la demande. A demande croissante prix croissant, dit-on. Un observateur – qui ne manque pas d’humour – se plaisait à imaginer les Chinois et les Indiens se privant de voitures et de frigos pour éviter une explosion du prix du baril de pétrole. Qu’à cela ne tienne. La Chine avait annoncé avoir constitué des stocks importants de pétrole en prévision des Jeux olympiques. Rendez-vous que j’ai raté, je me répète, je le sens.
Non seulement le pétrole est l’objet d’une guerre des prix en approvisionnement, mais il est également la source de conflits qui conduisent à des guerres sanglantes. C’est devenu un lieu commun que de citer l’Irak.
La Géorgie, maintenant. Elle ne produit pas de pétrole. Elle a le malheur d’être située entre l’Iran et les oléoducs et gazoducs sous monopole russe. L’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan, inauguré en 2006 et long de 1.774 km (BTC), transite sur ses terres. Capacité : 1,2 million de barils par jour.
La Russie et la Géorgie montrent qu’elles ont des relations plutôt crispées, voire hostiles, c’est le moins qu’on puisse dire. L’Ossétie du Sud, soutenue par Moscou, veut son indépendance de la Géorgie. Tbilissi veut reprendre le contrôle de la région qui devrait être, de facto, indépendante depuis la chute de l’URSS en 1991.
Vladimir Poutine, premier ministre, veille au grain. Il est à Vladikavkaz, capitale de la république russe d’Ossétie du Nord. Il prévient Tbilissi. Il sera difficile à la Géorgie, après son opération « criminelle » contre l’Ossétie du Sud, de rétablir sa souveraineté sur le territoire. « Il est difficile de s’imaginer comment il serait possible après tout ce qui s’est passé (…) de convaincre l’Ossétie du Sud de faire partie de l’État géorgien », a soutenu Vladimir. Sauf qu’encore une fois, il a omis de commenter la propre intervention de la Russie – qualifiée d’invasion par la Géorgie – qui a bombardé des objectifs « stratégiques, économiques, civils et militaires », tels le port de Poti sur la Mer noire et la ville de Gori proche de l’Ossétie du Sud. Le contrôle de la région qui permet l’acheminement du pétrole entre la Mer Caspienne et la Mer Noire sans passer par la Russie est au cœur du litige. Le pétrole et les pétro-dollars. Qu’ont à dire les populations au centre de cette guerre pour l’acheminement du pétrole ? Que dalle, dirait mon copain de Caën, sinon de subir. Dmitri Medvedev, a déclaré, de Moscou, par voie de communiqué : « La partie géorgienne a commis une agression contre des habitants pacifiques et des soldats russes chargés du maintien de la paix ». Dmitri sort peu. Il n’était pas à Pékin. Vladimir l’a remplacé.
Bernard Kouchner est dans la région. La présidence française de l’UE, dans une mise en garde inattendue, a prévenu Moscou par écrit que ces opérations militaires sur le territoire géorgien affecteraient leur relation. Nicolas Sarkozy se rendra donc à Moscou. Pour dénoncer, courageusement, cet acte d’agression de Moscou à l’encontre de Tbilissi. Washington accuse Moscou de vouloir faire tomber le président géorgien pro-occidental, Mikheïl Saakachvili. Ballet diplomatique habituel.
Pour l’heure, les fortes tensions opposant la Russie à la Géorgie en Ossétie du Sud n’ont pas eu, jusqu’à ce jour, semble-t-il, d’impact sur les cours pétroliers, si ce n’est, par contre, la chute d’environ 6% des actions russes sur les places boursières. La Géorgie compte prendre tous les moyens pour importer du gaz d’Iran, d’Azerbaïdjan et d’Asie centrale pour réduire sa dépendance énergétique de Moscou après la récente forte augmentation du prix du gaz russe. Bruxelles a prévenu Moscou sur son attachement à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Géorgie dans ses frontières actuelles reconnues par l’ensemble de la communauté internationale. La Russie a répété au cours du week-end qu’elle n’a pas l’intention d’envahir la Géorgie. Le gazoduc que l’Arménie et l’Iran ont construit en dépit de l’opposition de Moscou et de Washington inquiète tout de même la Russie qui craint de perdre son monopole. Et si l’Amérique pouvait ravir une parcelle de ce monopole à Moscou ? Ballet diplomatique habituel.
Je m’étais promis de ne plus me lancer, pendant cette période intense d’écritures institutionnelles, dans les grandes analyses géopolitiques. Chassez le galop, il revient au trot. Je reviens donc à mon point de départ. Le pétrole.
Il y a cette déclaration forte de Barack Obama : « J’accuse les sociétés américaines d’avoir constamment lutté contre toutes les tentatives d’amélioration de la consommation des véhicules ». C’était en mai 2007. Il a changé d’idée depuis. Les lobbies veillent. Barack Obama a proposé la semaine dernière de puiser dans les réserves pétrolières stratégiques du pays afin de faire baisser les prix de l’essence. Important revirement sur sa politique énergétique puisqu’en juin, lorsqu’il avait présenté ses propositions en la matière, il s’était déclaré défavorable à l’utilisation de ces réserves, sauf en cas d’extrême urgence. Il s’agit, selon son camp, d’une mesure à court terme destinée à atténuer la crise énergétique.
En mai 2008, Nicolas Sarkozy avait, devant la flambée des prix du pétrole, soulevé l’hypothèse de suspendre la fiscalité, pour la part TVA, sur le prix du pétrole. Le brave président n’a pas développé davantage cette hypothèse de poser la question à ses partenaires européens : « Pour décider, il faut l’unanimité, donc il n’est pas question de le promettre ». Sagesse toute chinoise…
Pourquoi je vous parle aujourd’hui du pétrole? En raison du hasard qui m’a mené sur ces pages de MailOnLine. Je n’ai pas lu le texte : « la guerre du pipeline ». Manque de temps. Seules les photos ont attiré mon attention. C’est le prix du pétrole. Et cliquez sur ce lien pour voir ce qui est qualifié de dommage collatéral. Huffington traite mieux que je ne saurais le faire de la stratégie géopolitique dans la région. À lire. Si vous avez le cœur solide. Il y a aussi le New York Times qui analyse de plus près les intérêts pétroliers régionaux. J’arrête ici.
Combien payez-vous votre litre d’essence, déjà ?
Bien le bonjour chez vous.